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Nicole Obélé : « Mon album « Suglu ning » est l’école de la vie et de mes expériences »

Bonsoir Nicole Obélé, le portail des cultures Black et Afro se rapproche de toi en ce jour pour un entretien exclusif, comment vas-tu?

Je vais bien, merci. Bonsoir

Un bonjour en ton dialecte ?

Lequel? L’Ewondo, l’Eton le Douala, le Bodiman ou le Fufuldé? Tous ces dialectes ont occupé une place très forte dans mon enfance, mais puiqu’il faut choisir, je dirai de façon aléatoire, Mbembe amos!

Pour le moment, tu es au Cameroun, que prépares-tu pour tes fans ?

Je viens de mettre à la disposition du public, un album de 13 titres que j’invite tout le monde à découvrir.

Les critères de choix d’une carrière d’artiste sont plutôt tortueux quand on vient d’un pays émergent. Qu’est-ce qui a été le catalyseur de ta poussée vers les chemins de la scène ?

Disons que depuis toute petite, j’ai toujours aimé chanter. Je me suis toujours, aussi loin que peuvent  aller mes pensées, destinée à ce métier là.  Mais contrairement à beaucoup, j’ai plutôt grandi dans l’univers de la danse et du théâtre. Ma tante dirigeait une troupe de théâtre, le CECAD (Cercle camerounais d’art dramatique) et une troupe de danse, le Ballet Bantou,  dont je faisais partie. J’ai donc fait mes premières scènes, je dirais vers l’âge de 5 ans.

Le tatouage « Nelly Fannia », pardon si on écorche l’orthographe ! Que signifie-t-il ?

Non, c’est très bien écrit, merci. En fait, Nelly Fannia,  c’est ainsi que se prénommait ma défunte fille, décédée dans un accident de la circulation il y a 3 ans alors qu’elle revenait de l’église avec sa grand-mère (ma mère). Ce fut une expérience très difficile pour moi dont je commence peu à peu à me remettre. Cet album lui est d’ailleurs dédié.

Tu es une véritable globe-trotteuse inside & outside Cameroon déjà dès ton plus bas âge. Car tu es née à Yaoundé, tu grandis entre Douala et Garoua. Toutes ces destinations t’ont-elles grandie ?

Oui, évidemment, les voyages forgent la jeunesse. Ils sont l’occasion de s’ouvrir à des cultures autres que la nôtre et de faire découvrir les uns aux autres ce qui fait la particularité, la singularité de chacun. C’est donc quelque chose d’indispensable en ce qui me concerne, compte tenu de la carrière que j’envisage aujourd’hui.

A Garoua comme à N’gaoundéré, tu construis un mythe autour de toi, avec ta victoire au concours Mutzig et des prouesses universitaires. Tu étais déjà partie pour faire la une des affiches musicales. Pourquoi cela a-t-il autant trainé pour que tu te dévoiles comme artiste confirmée ?

Un mythe, je ne sais pas. Il est vrai que mes camarades de l’université de Ngaoundéré m’ont donné vraiment beaucoup d’amour et que la victoire au concours mutzig m’a permis de nouer beaucoup de contacts avec des musiciens de Douala, moi qui venais de Ngaoundéré mais, bien que cela puisse paraître curieux, j’ai décidé  de prendre le temps de bien faire les choses afin de donner au public un travail de qualité, le décès de ma fille est venu rallonger ce délai que je m’étais fixé.

Peux-tu nous raconter brièvement les différents événements qui ont façonné ce talent et l’ont élevé à cette époque où tu étais la perle rare des universités ?

Euh…le club musique de l’université de Ngaoundéré, bien que orchestre universitaire avait en son sein de  bon musiciens et les critères de sélection étaient plutôt pointilleux.  J’ai eu l’opportunité de faire partie de l’équipe qui a représenté l’université au premier Festival universitaire des arts et de la culture en décembre 1999, juste 1 mois après mon arrivée dans l’orchestre, nous en sommes sortis avec un épi d’or, suivra un deuxième en 2001 dans la catégorie musique traditionnelle.

Le public universitaire est très exigeant, vous le savez et celui-ci a décidé je ne sais trop pourquoi, dès ma première apparition devant lui, qui etait aussi ma toute première prestation live, de faire de moi l’élue de son coeur, alors, je me suis retrouvée dans l’obligation de faire toujours mieux pour ne pas décevoir ce public qui m’avait adoptée si spontanément. Ma reconnaissance va vraiment en premier à son endroit, car c’est lui qui m’a permis de croire que j’étais vraiment faite pour ce métier.

Tu as été deux fois Epi d’Or en 1999 et 2001 ; Prix spécial du jury au concours Afcamusica en 2001 et meilleure chanteuse cette fois en 2003. Si jeune, est-ce que tu arrivais à te poser et réaliser ce qui t’arrivait ?

J’ai été épi d’or deux fois avec l’université de Ngaoundéré dans le cadre de l’UNIFAC (Festival Universitaire des Arts et de la Culture), il ne s’agit pas d’une victoire personnelle, mais je suis fière d’en parler parce que c’était le fruit de longues semaines de travail ardu. Pour ce qui est des autres prix, je dirais que pour moi c’était la confirmation dont j’avais besoin pour être sûre que j’étais vraiment faite pour cela.

Parlons à présent de ton album « Suglu Ning ». Comment peux-tu le définir dans son ensemble ou mieux succinctement ?

Il s’agit d’un album de 13 titres dans lequel l’on retrouve aussi bien de la musique acoustique que des rythmes plus ou moins enlevés. De la new bossa, en passant par du makunè-rock, des rythmes sahéliens ou encore des ballades jazzy. Tout ceci pour accompagner des mélodies chantées en Ewondo, Bassa,  Fang,  Bulu,  Fufuldé, mais aussi en Français et en Anglais. Les chansons parlent de l’amour sous toutes ses formes. Tout L’album a été enregistré en live entre la France et le Cameroun.

Les influences qui te traversent sont assez éparses, ouvertes. Pourquoi ces choix ?

Il ne s’agit pas vraiment d’un choix, ces influences me viennent de l’univers musical éclectique dans lequel j’ai grandi et des différents voyages que j’ai effectués.  J’avoue également que je suis quelqu’un de très curieux musicalement parlant, je peux passer des journées entières sur youtube à écouter des musiciens que je ne connais pas.

Quels ont été les musiciens qui ont été à l’œuvre pour magnifier ce premier opus ? Et tes rapports avec eux ?

J’ai eu l’honneur d’avoir monsieur Étienne MBAPPE à la direction musicale, mais également à la basse, mais aussi quelques membres de son groupe « Su la take » de ces années là,  tels que Jim Grandcamp, Roger Biwandu. Pour permettre une certaine ouverture, nous avons travaillé avec d’autres comme Tony  Rabeson,  Patrice Marzin  et des musiciens de la place nationale dont Denis Moussinga, Didier Mpondo, Joly Mandengue,  également auteur et compositeur de certaines chansons présentes sur l’album, Simplice Kengne,  Alain Biyegui, plus connu sous le nom de Bob et Deko Ebongue. Nos rapports sont des rapports normaux que l’on entretient avec des collègues avec plus ou moins d’affinités avec certains.

Que signifie d’ailleurs « Suglu Ning » ?

« Suglu ning » en langue bassa  signifie « l’école de la vie ». J’ai décidé de l’intituler ainsi à cause de tout ce que j’ai traversé depuis quelques années. J’ai beaucoup appris et la leçon principale que j’en retire, c’est qu’il faut toujours garder espoir. Toujours chercher à l’intérieur de soi, cette petite étincelle qui fait qu’on aura toujours de quoi rallumer la flamme, la force de se relever. . .

En rapport avec tes origines camerounaises, toi qui est depuis longtemps une globe-trotteuse musicalement comme au sens propre du terme, quel est le titre de ton album que tu nous conseillerais ?

Euh…toutes ces chansons sont mes bébés, c’est vrai que j’ai mes préférences, mais je préfère les garder pour moi. Mon conseil, c’est d’écouter toutes les chansons de l’album, chacun selon sa sensibilité pourra, je crois, se retrouver dans un titre ou dans un autre.

La signature de M. Etienne Mbappè est tout à fait palpable dans la réalisation comme dans certains sons. T’estimes-tu privilégiée ?

Ouh la! Bien sûr que je me sens privilégiée (qui ne le serait pas?). Avoir l’empreinte d’un aussi grand nom sur mon album, qui plus est, un premier album, c’est tout simplement énorme. J’ai fait sa connaissance par le biais d’un  ami commun. Àprès lui avoir demandé s’il était possible qu’il s’occupe de la direction musicale de mon album que j’étais en train de préparer, il a demandé  à avoir une maquette pour écouter un peu dans quelle direction j’allais. Après avoir reçu et écouté la maquette, il a dit oui, et tout a pu commencer. Il a choisi le studio, les musiciens. J’ai ainsi pu travailler dans le studio où il enregistre ses disques, le Studio Juno, avec son ingénieur du son Bertrand Fresel,  je n’en revenais pas, mais il m’a tout de suite mise à l’aise et tout s’est très bien passé.

Constat banal ! Sur la pochette de ton album, on ne voit que des grands noms, sans vouloir les citer de nouveaux ; cela veut-il dire que tu ne donnes pas de chance aux plus jeunes de travailler avec toi et bénéficier de ton expérience ? N’as-tu pas en vue un ou des featurings avec des artistes chanteurs camerounais émergents et des musiciens concomitamment ?

Des grands noms peut-être, mais de grands musiciens, surtout, c’est certainement le souci d’un bon résultat. Mais cela ne veut pour autant pas dire que si l’occasion se présente, je ne travaillerai pas avec des artistes émergents (n’en suis-je pas une moi-même?). Plus sérieusement, je suis ouverte aux éventuelles collaborations, mes principaux critères sont la sensibilité et le sérieux.

Entre là-bas et ici, où préfères-tu te poser pour travailler ?

Sincèrement, ça dépend de la direction que je compte donner à mon travail. J’aime beaucoup échanger, donc, ici ou là-bas, tant que je prends du plaisir dans ce que je fais, ce n’est vraiment pas important.

Pourquoi te surnomme-t-on La Javanaise Nicole Obélé ?

La javanaise??? Euh…lors du festival de la chanson française à Porto Alegre au Brésil, j’ai fait une interprétation en Bossa nova de la célèbre chanson « la javanaise » de Serges Gainsbourg, version qui a été très appréciée et certains amis ont par la suite commencé à m’appeler « la javanaise ».

De quoi est-il question dans le fameux « projeto Tamar » ?

Le « projeto Tamar » entendez projet Tamar (le mot tamar est une contraction de tartarugas marinhas, en français tortues marines) est un organisme qui lutte pour la protection des tortues marines. Pendant mon séjour au Brésil, j’ai eu l’honneur de faire partie de ce projet et même d’immortaliser mon passage en participant vocalement à l’enregistrement d’une chanson « amigo medo » du portugais « la peur, mon amie ». Chanson qui parle de la peur qui anime une tortue marine lorsqu’après être sortie de l’oeuf, elle est confrontée à un bon nombre de difficultés pour pouvoir atteindre le large.

La musique camerounaise fait sa route à sa manière. Quel est ton point de vue sur ce sujet souvent épineux ?

Le Cameroun est un grand carrefour, normal donc que ce soit un lieu de brassage de cultures, normal que la musique camerounaise soit également influencée par tous les courants musicaux qui passent par là.  C’est le prix à payer quand on est pays ouvert.

Que réponds-tu ou à quoi penses-tu lorsqu’on te dit : SOCAM ; MINAC ?

Beaucoup de choses, mais ceci dit, je préfère que l’on laisse chacun faire son boulot. Je m’évertue à faire le mien et à le faire bien, pour le moment, je m’arrête là.

Des conseils aux jeunes qui sont tentés par une carrière musicale ?

Je ne sais pas si je suis bien placée pour donner des conseils, mais de par ma petite expérience, ce que je pourrais dire, c’est que c’est un domaine très difficile, où il faut beaucoup de rigueur et de travail. Il faut faire en sorte d’être bien entouré, car c’est très facile de tomber sur des vendeurs d’illusions. L’une des façons d’éviter cela, c’est de ne pas se lancer avec l’objectif d’être star à tout prix, car c’est la meilleure façon de tomber dans les bras des requins  dont regorge ce secteur. Avoir la foi en ce qu’on fait, car les proches dont on attend généralement le soutien en premier sont ceux là qui cherchent à nous décourager. Comme dans bien d’autres domaines d’ailleurs, le travail et une bonne discipline finissent toujours par payer.

Jusqu’où voulez-vous aller en tant qu’artiste ?

Le plus loin possible. J’aimerais vraiment pouvoir toucher le maximum de personnes. Avoir le maximum de coeurs qui battent à l’unisson au rythme de ma musique.

Votre plus beau souvenir ?

J’ai eu plein de bons moments dans ma vie jusqu’ici,  et il est difficile pour moi d’un choisir un comme étant le plus beau.

Votre pire expérience ?

Le 22 janvier 2011 décès de ma fille et toute la période qui a suivi.

Comment contacter Nicole Obélé ?

Il est possible de me contacter via facebook en tapant NICOLE OBELE ou sur twitter @nicoleobele

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