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Zoom sur Marie-Paule Djegue Okri, la première femme en Afrique subsaharienne à recevoir le prix Simone-de-Beauvoir

Marie-Paule Djegue Okri, co-fondatrice de la Ligue ivoirienne des droits des femmes a reçu mardi 9 janvier 2024, le prix Simone-de-Beauvoir pour la liberté des femmes. Elle a reçu cette distinction pour son engagement contre les violences à l’égard des femmes et en faveur de leur autonomie. Qui est cette jeune femme engagée ? Nous vous dressons son portrait.

Elle est jeune, belle et intelligente. Co-fondatrice de la « Ligue ivoirienne des droits des femmes » en 2020, Marie-Paule Djegue Okri, agronome de formation et consultante en agro écologie, s’est engagée au quotidien pour l’autonomie économique et financière des femmes en milieu rural. Elle encourage les femmes à la création d’activités génératrices de revenus, en particulier dans le secteur agricole.

La lauréate 2024 du Prix Simone-de-Beauvoir pour la liberté des femmes, a mis en place et développé des formations à l’agriculture destinées aux mères de famille sans emploi et illettrées. Grâce à l’argent de la vente des légumes, ces femmes assument le coût de la scolarité des enfants, ce qui crée un cercle vertueux d’émancipation.

Les membres de l’association co­ordonnent leurs actions par messageries instantanées, multiplient les débats et les campagnes de prévention, forment des bénévoles, éditent des dépliants comme celui sur la procédure à suivre après un viol, secouent le ministère ivoirien de la femme, de la famille et de l’enfant qu’elles jugent déconnecté des réalités. Leurs ressources : quelques dons privés, des ventes de T-shirt, des cotisations, une incomparable énergie et un sens de la communication aiguisé.

L’un de leur coup d’éclat : une campagne sur les réseaux sociaux pour dénoncer la vente de pagnes « spécial 8-Mars » du ministère en 2021. « Lorsque nos droits seront respectés, lorsque les lois seront appliquées, lorsqu’on aura la possibilité d’avoir une autonomie financière, on pourra s’acheter des pagnes », s’était agacée Marie Paule Okri.

« J’ai toujours été féministe »

Marie Paule se définit comme une féministe, chose qu’elle ignorait elle-même. « J’ai toujours été féministe. Seulement, je ne savais pas le nommer. On me disait que j’étais comme ça, alors je suis allée voir sur Internet ce que c’était. J’ai trouvé ça super. C’était ça », affirme-t-elle. Être féministe en Côte d’Ivoire, c’est inévitablement s’exposer aux railleries et aux insultes : « vendue à l’Occident », « célibataire aigrie », « mauvaise femme ». Marie Paule Okri s’en moque. Elle s’en amuse même. Ça ne l’empêche pas de s’exposer médiatiquement en acceptant les invitations à des débats télévisés très regardés. Son appel à une société plus juste et inclusive pour les femmes doit passer. Pour elle, c’est l’essentiel.

Marie-Paule Okri a grandi à Issia, en plein cœur du pays, au côté d’un père progressiste qui mettait sur un pied d’égalité ses quatorze filles et garçons. Elle lui doit sa fièvre militante. « Quand ma mère me disait de laver les assiettes parce que j’étais une fille, lui ne voyait pas ça d’un bon œil. Il voulait que je sois la meilleure à l’école », confie la trentenaire.

À la mort de son père, alors qu’elle n’est qu’adolescente, que la Côte d’Ivoire sort d’une crise politique majeure et s’apprête à replonger dans un cycle de violences, Marie-Paule Okri s’accroche pour poursuivre ses études. Elle est accueillie un temps chez un oncle, puis chez des proches. « Il arrivait même que des inconnus me donnent de quoi manger que je parte à l’école », se souvient-elle. « Aujourd’hui, je veux rendre ce qu’on m’a donné ».

L’engagement politique une nécessité pour Marie-Paule Okri

Selon vanityfair, Marie-Paule Okri réfléchit sérieusement à une candidature aux élections législatives de 2025 dans sa région natale. Elle est convaincue que l’engagement politique est une nécessité pour faire bouger la société dans un pays où trois grands partis noyautés par des hommes se partagent le pouvoir depuis trente ans et où les femmes ne représentent que 12 % de l’assemblée. « La politique décide de ce que je vais manger, de comment je dois m’habiller. Je n’ai aucune envie qu’on décide pour moi toute ma vie. Je veux prendre part aux instances de décision. Et puis ceux qui sont élus le font tellement mal que je veux prendre leur place. »

Selon le jury du prix Simone-de-Beauvoir qui qui a porté son choix sur elle, l’action de Marie-Paule Djegue Okri rejoint la philosophie de Simone de Beauvoir qui place au cœur du Deuxième Sexe l’idée que « c’est à la propriété privée que le sort de la femme est lié à travers les siècles : pour une grande partie son histoire se confond avec celle de l’héritage ».En prônant un retour à la racine de l’idée féministe, c’est-à-dire être égalitaire avant tout, Marie-Paule Djegue Okri rejoint la pensée de Simone de Beauvoir.

A propos du prix Simone de Beauvoir

Créé par Julia Kristeva en 2008, le Prix Simone-de-Beauvoir récompense chaque année des actions ou des personnes ayant contribué à la progression de la liberté des femmes dans divers domaines, de la littérature à l’activisme, et ce, à l’échelle mondiale. La cérémonie de remise de ce prix, tenue annuellement le 9 janvier pour célébrer l’anniversaire de Simone de Beauvoir, vise à honorer la mémoire de cette grande figure intellectuelle du féminisme.

Félicitation à Marie-Paule Djegue Okri pour son engagement et son prix !

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Danielle NGONO

Rédactrice chez Declik Group

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