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Les noirs africains de Tanger se révoltent après la mort d’un migrant camerounais

En trois mois, c’est le troisième cas de décès de migrant subsaharien au cours d’opération de police à Tanger. Le jeune homme était un Camerounais en contact avec le Haut Commissariat aux réfugiés, explique un témoin de la rafle à RFI. Alors que la police procédait, en début d’après-midi, à une série d’arrestations dans l’immeuble où il résidait, le jeune homme aurait tenté de résister. Quelques instants plus tard, son corps sans vie gisait en bas de son immeuble.

Révoltés, des dizaines d’habitants se sont rassemblés autour du cadavre qu’ils ont voulu emmener eux-mêmes à la morgue, avant d’être bloqués sur la route par les forces de l’ordre marocaines. Les heures qui ont suivi ont été marquées par des affrontements sporadiques avec la police. Après la médiation de responsables des droits de l’Homme, le corps du migrant a finalement été restitué aux forces de l’ordre. En échange, un groupe de dix migrants a obtenu de l’accompagner à la morgue.

"On a voulu le porter nous même à la morgue pour montrer que nous sommes déterminés à connaître les circonstances de sa mort"

« Raphael est lui aussi camerounais et vit illégalement depuis huit mois à Tanger.

J’étais dans un immeuble à proximité quand les policiers sont arrivés. C’était en fait la deuxième fois de la journée qu’ils venaient procéder à des arrestations, ce qui est très rare, donc nous avons tous été surpris. Évidemment, dans ces cas là, tout le monde essaie de sauver sa peau. Ce n’est qu’après que des Marocains et des migrants m’ont raconté que le jeune homme s’était retrouvé sur la dalle en haut de l’immeuble où il pensait échapper à la police. Finalement il s’est fait coincé et, selon eux, il a été poussé. [Une information que nous n’avons pu confirmer de source indépendante.

Quand la police est partie, on est venus devant l’immeuble et son corps était étendu sur le sol [une ambulance a été dépêchée, mais les habitants ont refusé qu’elle prenne le corps]. Immédiatement, nous avons choisi de nous mobiliser car ce n’est pas la première fois que ça arrive. À chaque fois, le corps de la victime est embarqué et il n’y a pas de suite. Cette fois-ci, on a voulu le porter nous-mêmes à la morgue, dans le centre-ville, pour montrer que nous sommes déterminés à connaître les circonstances de sa mort.

Depuis trois mois, des opérations d’arrestations ont lieu tous les jours, avec la même brutalité. Il faut que les gens sachent comment nous sommes traités ici. Ça ne peut pas continuer. »

"J’ai passé la nuit à me demander si cet homme avait pu sauter de lui-même"

Amadé est guinéen. Il habite Casablanca, mais est actuellement, depuis plusieurs semaines, dans le quartier de Boukhalef. 

« Moi-même, qui ai des papiers, je me suis déjà fait embarqué par la police. Ils prennent tout le monde, migrants illégaux, étudiants, travailleurs légaux etc… et ce n’est qu’après qu’ils vérifient si vous êtes ou non en infraction. Plusieurs fois ils m’ont arrêté à Tanger et m’ont ramené à Casablanca où je réside la plupart du temps. C’est insensé puisque mes papiers me permettent de circuler dans le pays.

Le quartier de Boukhalef est principalement habité par des Africains subsahariens, notamment des Camerounais et des Sénégalais car les prix des logements sont plus bas que dans le reste de la ville. Quand la police les arrête, ils sont renvoyés dans le désert, à la frontière algérienne. Mais de là, tous finissent par revenir à Oujda, ville frontalière, puis à Tanger. J’ai passé la nuit à me demander si cet homme avait pu sauter de lui-même. Je ne pense pas. Tous ici savent que s’ils sont arrêtés, ils iront dans le désert et reviendront. Ils ont intégré ces règles. »

D’après le journal en ligne Tanja 24, les autorités ont nié toute implication dans cet incident. Une enquête a été ouverte pour en déterminer les circonstances.

À plusieurs reprises, l’Association marocaine des droits de l’Homme a dénoncé des violences et mauvais traitements lors d’opérations massives de reconduite de migrants subsahariens à la frontière. Reconnaissant à demi-mot le malaise, en septembre 2013, le roi Mohammed VI avait déclaré que ce dossier devait être approché "de manière globale et humaniste" tout en niant qu’il y ait  "usage systématique de violence de la part des forces de l’ordre".

Actuellement, les migrants subsahariens seraient une vingtaine de milliers à vivre dans le royaume, pour la plupart clandestinement.

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