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DJ Arafat, « maître ès controverse » Nouvel album du phénomène du coupé-décalé

Dans la rubrique people des médias d’Afrique francophone et sur la planète Internet, la vidéo a suscité un vif émoi depuis le début du mois d’avril. Et pour cause : on y voit DJ Arafat, passablement énervé, briser une assiette sur la tête d’une jeune femme avec une froideur qui laisse d’autant plus pantois. Les réactions à ces images ne se sont pas fait attendre : violentes, comme cette UNE d’un magazine ivoirien montrant le visage ensanglanté de la victime – un photomontage, assure l’artiste, dans une séquence filmée où les excuses laissent vite la place à la théorie d’un complot mené par ses ennemis…

A la veille de la sortie de son nouvel album Commandant Zabra, une telle publicité aurait pu s’avérer dévastatrice. Au final, il y a fort à parier que l’incident ne fasse qu’écorner légèrement l’image de l’intéressé, déjà soumise à rude épreuve à de nombreuses reprises ! En réalité, rien n’est vraiment rationnel, ni mesuré dès qu’il est question des acteurs du coupé-décalé en général, et de DJ Arafat en particulier.

Tout un style

Les débordements sont inhérents à la nature même de ce mouvement. S’il s’inscrit dans la filiation de la Société des ambianceurs et personnes élégantes (Sape) incarnée par le Congolais Papa Wemba, il a poussé la logique bien plus loin, à travers des comportements sans retenue : ainsi, le fameux “travaillement” qui consiste à jeter des liasses de billets pouvant atteindre des montants aussi faramineux qu’indécents, ou encore cette propension à l’immodestie teintée de parano. Au royaume de la légèreté, les apparences sont reines, et qu’importe la teneur des propos ! Quant à la dimension artistique de la musique, elle est surtout basée sur la danse, sa fonction première.

Au début des années 2000, Douk Saga a ouvert la voie du coupé-décalé que l’on dit né dans les boîtes de nuit afro-parisiennes. Son territoire s’est vite étendu aux maquis branchés d’Abidjan et des capitales des pays voisins dans lesquelles le phénomène s’est exporté. Celui qui était surnommé “Le Président”, disparu en 2006, a donné le ton : un hédonisme revendiqué, assumé.

Ces compagnons de route ou héritiers de son collectif Jet Set ont repris le flambeau, avec ce qu’il faut de provocation. Dans les noms de scène, d’abord, qu’ils empruntent à des chefs d’État ou de mouvements politiques, voire à des terroristes… : Mollah Omar (devenu Molare), Abou Nidal, Bedel Patassé… Arafat ne déroge pas à la règle. Le patronyme du leader palestinien emblématique se retrouve maintenant associé aux dancefloors, curieuse évolution de l’histoire !

“Je m’appelle Houon Ange Didier, et je suis le fils d’un musicien et d’une mère musicienne. Quand on me parle de mélodie, ça me fait rigoler”, tient à préciser l’artiste de 26 ans dans un de ses morceaux. Du côté paternel, Pierre Houon peut se prévaloir d’avoir été l’un des premiers à obtenir un disque d’or dans son pays, en 1979, en duo avec Albert Doh. Ingénieur du son en studio et en live, il est aussi celui qui a trouvé sur son clavier la sirène de police en introduction du tube Brigadier Sabari d’Alpha Blondy.

Du côté maternel, le personnage est haut en couleurs. “Tina Glamour arrose un vigile de son urine et le gifle avec son slip !”, tirait un magazine à sensation ivoirien en août 2011. La chanteuse, souvent qualifiée de “reine de la sexy-moulance”, a fait de la provocation sa marque de fabrique. Et transmis ce trait de caractère à son fils.

Mégalo

Depuis ses débuts en 2003, DJ Arafat s’est imposé dans sa discipline, avec une musique électronique sur laquelle il fait entendre sa voix, ou celle de ses invités comme le rappeur Mokobé sur Ou La La, parue en 2011 et incluse sur le nouvel album. Mais la fibre artistique de Yorobo 8500 volts, comme il se surnomme aussi après avoir commencé à 3500 puis 5500 volts, alimente moins les commentaires que ses frasques. Lorsque son compatriote Jessy Matador évoque le “faux rythme” du coupé-décalé, et son absence d’identité, il répond sur Tweeter par une série d’insultes adressées à celui qui représenta la France à l’Eurovision en 2010. Ses multiples accidents de circulation défraient la chronique. Idem des cadeaux que lui offre le footballeur camerounais Samuel Etoo, auquel il consacre un disque entier. Au Togo, où il était attendu avec ferveur en 2010 pour un concert, le deejay ivoirien n’a pas fait le déplacement… après avoir toutefois empoché le cachet versé à l’avance, selon les organisateurs relayés par la presse locale. A Paris, dans la salle du Bataclan, il y a quelques semaines, l’hypothèse d’un autre faux bond a longtemps été redoutée par le public : la vedette de la soirée s’est fait attendre quasiment jusqu’à 4 heures du matin ! Dans le rôle qu’il se plait à jouer, avec ce qu’il faut de mégalomanie et de paranoïa réelles ou feintes pour entretenir la flamme, DJ Arafat excelle. Se faire détester par les uns est un moyen de se faire aimer par les autres.

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