Directeur du Centre des créateurs de Mode du Cameroun (CCMC), Yves Eya’a nous donne le déroulement des différentes activités qui meubleront cette 3e édition qui porte le thème « Valorisation et Développement des industries de Mode et création au Cameroun ».
Comment et pourquoi naît l’idée de ce forum ?
L’idée de ce forum naît du souci de professionnaliser les entreprises camerounaises dans le secteur des industries créatives en générale, sans inclure bien sûr les autres secteurs, parce qu’on n’est pas juste là pour parler de mode vestimentaire il y a également la photographie, le design, la peinture, la sculpture… je parle de « Mode » dans le sens large et l’aventure ira du 11 au 16 Juin 2012.
Il n’y a qu’à regarder dans tous les recoins de la capitale pour constater la prolifération de boutiques, industries de mode ou d’ateliers de couture, pensez-vous atteindre vos objectifs en touchant un grand nombre à travers tout le pays ?
Bien évidemment, j’espère toucher le grand nombre, c’est aussi ça l’objectif du forum aujourd’hui, celui de dire aux entreprises camerounaises : « professionnalisez-vous ». Parce qu’on remarque également que 3 entreprises sur 5 veulent toutes exporter leurs produits en Europe pour pouvoir un jour s’y installer. A nous de leurs dire « attention ». aujourd’hui en Europe, vous n’avez plus la possibilité de faire ce que vous faites ici au pays ; tenez par exemple, une industrie fait est dans le texte-habillement peut aller à Mokolo trouver son petit tissu à 5000frs confectionner un modèle et le commercialiser ensuite, c’est très simple. Or en Europe, il faut déjà présenter tous les papiers qui vont faire en sorte que l’entreprise ou les fournisseur eux-mêmes puissent exercer ; donc pour vous dire qu’il y a aujourd’hui toute cette problématique qui nous amène à dire que les entreprises camerounaises devraient se professionnaliser puisque si déjà elles payent leur patente, elles exercent de manière légale, il est tout à fait normale qu’elles se professionnalisent en fonction de leur travail ou de ce qu’elles veulent vendre sur le marché.
Quelle spécificité comptez-vous apporter à ce 3e forum ?
Alors la spécificité de ce 3e forum avec bien sûr la collaboration de l’école Best-Sabel de Berlin via Suzanne Krauss qui est Directrice du département stylisme que j’ai approché grâce au soutien de l’Institut Goethe lors d’une rencontre professionnelle, c’est de mettre l’accent sur la valorisation de matériaux locaux. Valoriser les choses qui sont faites sur place « Made In Cameroun », en l’occurrence ce tissu de la collection Ebony qui vient de la CICAM avec lequel tout le monde travaillera dans le cadre de ce forum ou des ateliers de formation. Donc avec Madame Suzanne Krauss on décide de travailler sur ce thème là, c’est-à-dire, que ce soit ceux qui viennent de Berlin ou Sakina M’sa qui nous viendra de Paris et qui travaillera avec les élèves du CETIC notre dame de Mvog Ada, ou les créateurs du Cameroun, tout le monde est imposé de travailler avec le tissu de « la collection Ebony » de CICAM qui est noir et Blanc et qui est tout simplement magnifique.
Là vous nous parliez du but même de ce projet et vous, qu’attendez-vous en retour, du moins quel rendement de la part des participants ou des entreprises qui seront venues vers vous ?
Vous savez, ça c’est une initiative privée comme c’est le cas du CCMC (Ndlr) que j’ai monté il y a de cela 3 ans, ce n’est pas facile tous les jours c’est vrai mais ma motivation vient du fait que je vois qu’il commence à avoir du changement. On constate que les entreprises essayent de percevoir ce qu’on leurs dit, même si ce n’est pas toujours évident, même si les mentalités diffèrent toujours selon les entreprises, mais mes attentes sont tout simplement de dire aux créateurs qu’on a beaucoup de potentiel dans notre pays et qu’ici c’est plus facile vu le coût des travaux réduit.
Vous pensez que l’on devrait définitivement tourner le dos à l’extérieur ?
Non pas tout à fait ça ; c’est même normal pour une entreprise de vouloir aller voir ce qui se passe ailleurs dans le cadre du développement de son pays et surtout pour son propre développement. Mais je demande, j’exhorte créateurs de travailler sur place et de consommer local.
C’est quoi un défilé de mode pour vous ?
Pour ceux qui me connaissent depuis longtemps, je fais partie des gens aujourd’hui pour qui la professionnalisation tient à cœur. C’est vrai que de nos jours on voit beaucoup de défilés, mais pour faire un défilé ce n’est pas une chose anodine ; un défilé ça coute énormément d’argent. Quand un créateur veut organiser un défilé, il lui faut beaucoup de temps, beaucoup d’argent parce qu’il a travaillé sur une collection, il a employé des gens… et si à l’issue de ce défilé il y ait des gens qui viennent juste pour se promener et parce que c’est leur sortie du Dimanche ou du Samedi, moi ce n’est pas ça qui m’intéresse. Raison pour laquelle nous avons fermé l’accès au défilé qui se passe d’ailleurs à cet endroit magnifique qui est la résidence de l’ambassadeur de France. N’allez pas penser que c’est une discrimination, tout le monde y est convié, mais à partir du moment où les gens y trouvent un intérêt. Voilà pourquoi nous y avons convié des acheteurs potentiels, des acteurs de la mode camerounaise et des experts du secteur. Un créateur organise ce genre d’événement pour qu’il en vive, il faut qu’il vende ses modèles, voilà pourquoi il faut le soutien des banques par exemple ou des mécènes. Parce qu’il ne faut pas se mentir, sur 10 créateurs au Cameroun, seuls 2 ou peut-être moins ont accès au crédit bancaire.
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