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PhillBill, un beatmaker doué, un chanteur excellent et un artiste connecté à ses racines

Il est jeune, talentueux et camerounais. Chanteur, auteur-compositeur et beatmaker. Il fait partie de Ridimz. Il y a de nombreuses années, il a entamé son parcours. Depuis cette époque, au quotidian, il essaye de prouver que les camerounais ont quelque chose à apporter dans l’industrie musicale. Pour nous, il s’est ouvert dans une interview fleuve. Il parle de famille, d’amitié avec K-Master-K, de collaboration avec Pit Bacardi et de sa propre carrière. Entretien avec PhillBill alias PhillBill Beatz alias Shaba. Allons-y !

Bonjour Phillbill, bienvenue sur Culture Ebene. Comment tu vas ? C’est un plaisir de te recevoir. Nous savons que tu es un artiste mais qui es-tu ? Quel est ton vrai nom ? Ton lieu de naissance ? Ta famille ? Dis-nous tout …

Bonjour Culture Ebene. Je vais bien. Appelez moi Diyani Bill Munyengue. Je suis né à Limbé, région du Sud-Ouest. Je suis de la Meme. Je suis le premier d’une famille de quatre. Ma mère est nigérianne, mon père est camerounais. Ce n’était pas si facile pour moi. Venir d’un foyer où les gens sont chrétiens, d’un foyer où les gens croient tellement à l’éducation, pour devenir médecin, magistrat, avocat… Ce n’était pas facile parce que mon père surtout était sur mon cou tous les jours pour être sûr que j’obtienne d’acquérir mon diplome. Pour lui c’était l’assurance pour devenir quelqu’un de très important dans la société.

Alors comme je m’intéressais à la musique, ce n’était pas si facile, me battre tous les jours avec ma famille. Mon père me renie parce qu’il ne veut pas me voir faire de la musique. Ce n’était pas si facile. Mais, en fait, j’ai réalisé ce qu’il voulait parce qu’il voulait que je devienne diplômé, que je fasse mon Master mais je ne pouvais pas faire mon Master, j’ai juste eu mon BST à l’Université de Buea où j’ai étudié les arts du spectacle et les arts visuels. Et, à partir de là, je lui ai dit que je voulais me concentrer sur la production musicale.

Être chanteur, interprète, producteur de musique. Ce n’était pas si facile. Mais à la fin de la journée, il n’avait pas d’autre choix parce que j’étais déjà populaire, partout où il allait, il ne s’agissait que de mon nom, moi, moi, moi. Même ses amis proches étaient au courant. Il est tellement heureux, il n’a pas eu le choix, surtout quand j’ai commencé à en vivre.

Tu es donc beatmaker, instrumentiste, chanteur, auteur-compositeur… Comment tu fais ça ?

Bien sûr, pour tout ce qui disent « Ne pas planifier, c’est planifier l’échec ». Si vous êtes organisé, vous ne serez jamais désorganisé. Je fais de mon mieux pour être organisé, m’assurer que tout est programmé. Ce n’est pas facile car presque tous les artistes veulent travailler avec moi. Je fais de mon mieux. J’ai du temps pour Ridimz et quand il est temps pour Ridimz, je me concentre sur Ridimz et quand il est temps pour Phillbill, je me concentre sur Phillbill. Donc, c’est comme ça que j’essaie de gérer mon temps. J’essaie de m’assurer que je partitionne. Quand c’est l’heure de Ridimz, je coupe, je n’ai pas le temps avec les autres artistes.

D’autres artistes veulent aussi mettre la pression, ils veulent s’assurer que tu fasses leur travail. J’ai aussi mes gars avec qui je travaille en studio; mes gars à qui j’enseigne la production musicale. Donc en fait, ils m’aident parce que moi-même je ne peux pas porter toute l’industrie sur ma tête. Je me suis même évanoui un jour c’est pour ça que j’ai essayé de recruter des gars ou des jeunes filles productrices comme partenaires.  Je pense que c’est comme ça que je gère mon temps parce que si je ne le fais pas, je n’aurai pas le temps de faire mon propre travail.

Est-ce que le fait d’avoir des origines nigériannes influence votre orientation artistique ?

Yeeeeeaahhh, bien sûr parce que j’ai passé trois ans au Nigeria pour étudier la production musicale. Ça a en fait changé ma vie, c’est quelque chose que je ne pourrai jamais oublier. C’est quelque chose qui a changé ma vie, cela m’a en fait aidé à en savoir plus sur l’afro beat, l’afro pop, m’a aidé à écrire de la musique en pidgin. Et je me souviens à l’époque, en 2008, quand je suis venu au Cameroun, j’ai rencontré Dr Nkeng, ils ont été surpris de m’entendre chanter en pidgin parce que je ne savais même pas chanter en pidgin. La plupart de mes collègues à l’époque, c’étaient des rappeurs, j’étais le chanteur, ils n’étaient que des rappeurs.

Être au Nigeria m’a fait en savoir plus sur l’afro beat, jouer avec les instruments. Celà m’affecte même aujourd’hui dans la façon dont je produis.  J’étais au Nigeria pendant trois ans pour étudier la production musicale. Cela m’a vraiment inspiré, cela a vraiment changé ma vie. Je pense que cela a eu un impact d’avoir une origine nigérianne. Et même si j’étais entouré de tous ces gars de la terre nigérianne à l’époque, j’ai quand même trouvé un moyen d’intégrer ma terre camerounaise dans mes sons afin qu’elle ne change jamais mes compositions, ma mentalité et la philosophie de mon type de musique.

Quelles sont tes influences en musique ?

Il y a tellement de choses. Je suis influencé par tellement de choses, sur la vie sociale, l’histoire des gens, ce qui se passe autour de moi. Aussi musiciens, légendes et idoles que je regarde comme Manu Dibango, Michael Jackson. Richard Bona, Fela Kuti. Il y a quelques artistes qui m’inspirent comme 2-Face Idibia, San Fan Thomas, Toto Guillaume. Et en dehors de celà, des influences autour de moi comme ma société, l’histoire des gens, ce qu’ils traversent dans la vie ; les histoires quotidiennes que je vois sur les réseaux sociaux, mes amis, mes collègues, leurs histoires, leurs expériences m’inspirent en fait pour écrire des chansons ou faire de la musique. Même la nature m’inspire, quand je sors j’entends un oiseau chanter, je vois comment les gens ripostent. J’avais l’habitude d’aller dans des clubs, je vais surtout au club juste pour m’amuser, m’asseoir, voir comment les gens dansent, entendre les sons que les gens aiment vraiment, comment le DJ joue.

 A quoi ressemble la journée type de Phillbill ?

(Rires). Ma journée, je ne sais pas. Ce n’est pas si facile. Parce que toute ma journée, je la passe en studio, à travailler pour sortir une chanson ou pour une réunion importante à laquelle assister. Mais la plupart du temps, quand je me réveille le matin, je fais ma prière du matin, je prends mes chants d’adoration, je prends mon bain. Je fais un peu d’exercices, pas tout le temps cependant, parfois je le fais, et parfois je ne le fais pas. Le studio est ma maison ; J’arrive juste au studio. Je pourrais probablement travailler toute la journée jusqu’au lendemain. Et je travaille surtout la nuit ; Je ne travaille pas la journée car la nuit je suis très inspiré. Mais dans la journée avec beaucoup de bruits naturels, d’ambiance, de sons, ça m’influence en fait et ça ne me fait pas me concentrer donc je travaille surtout la nuit et pendant la journée. Souvent c’est le contraire. Ça dépend.

Avant de composer un beat, tu écoutes d’abord d’autres mélodies ou tu as déjà en tête ce que tu vas faire ?

Yes. Avant de produire un beat, tout d’abord, si l’artiste est distant est de la diaspora ou même ici au Cameroun, je dis à l’artiste de m’envoyer une vn sur whatsapp, je l’écoute. Puis je commence par le rythme, je commence à composer le rythme selon la vn. Je cherche à comprendre le rythme, la mélodie. Quand l’artiste vient dans mon studio, je dis à l’artiste de chanter, quand il chante, j’essaie de sentir l’artiste, de sentir la voix, d’entrer dans la musique, et quand j’y vais, je ne vois que le travail final. Je ne sais même pas comment, je le vois juste comme ce sera à la fin. C’est ainsi que j’obtiens le son final.

Massah, ‘Dipita’ est partout. Quel est ton secret?

Mon secret, c’est l’originalité, mon secret c’est d’être qui je suis, de me démarquer, de représenter la racine d’où je viens. Mon secret, ce sont les percussions africaines, mon secret ce sont les sons africains, et plus particulièrement ceux du Cameroun car nous avons des sons qui sont connectés à toutes les parties du monde. Si vous voyez des gens danser le Dipita, surtout des blancs de Roumanie, de Russie, du Brésil, d’Angleterre, de France, d’Amérique, de partout dans le monde, c’est juste pour vous montrer que nous avons des sons qui se connectent à chaque partie du monde.

Donc je pense que le secret est de revenir aux sources parce que la vérité est que je ne peux pas faire plus que ce que font les Américains, comme le hip-hop et le r’n’b. Je ne peux pas faire plus que ce que font les Congolais le Ndombolo, la rumba, peu importe. J’ai besoin de me faire. Je ne peux pas faire ce que font les Jamaïcains, je ne peux pas danser plus qu’eux, reggae plus qu’eux. Je fais le makossa, je fais l’afro beat kossa comme je l’appelle parce que c’est un mélange de nos sons. C’est ce qui va pousser Diamond Platnumz à venir faire un exploit avec Ridimz. C’est ce que nous incitons Fally Ipupa à vouloir un exploit avec nous, idem pour Flavour of Nigeria. Parce que nous avons quelque chose qu’ils n’ont pas.

Nous ne pouvons donc jamais vouloir faire ce qu’ils font. Si nous faisons ce qu’ils font, ils ne viendront jamais nous voir pour une représentation, nous devons rester originaux. C’est pourquoi vous voyez que J Martins ira chercher Arafat pour faire un featuring, idem avec Flavour qui regarde Diamond Platnumz. Parce que nous voulons avoir ce goût des sons africains. Il s’agit d’essayer de se connecter avec les gens différemment, avec leurs différents sons.

Peux-tu nous parler de Ridimz ?

(Rires). Ridimz est composé de deux personnes. Et nous faisons surtout les compositions ensemble. Je fais le beat, on compose ensemble, K-Master-K fait tout le mix et le mastering. Et la plupart du temps, je suis aussi là pour aider et m’assurer que je donne mes idées et comment ça doit se passer. Nous avons commencé professionnellement en 2008, nous étions trois, et le troisième était Dr Nkeng Stephens qui est maintenant réalisateur vidéo. Nous aujourd’hui sur le label Shaba Muzik. Le nom Ridimz est venu naturellement. Il signifie rythmes comme vous le savez.

À quoi ressemble le travail avec K-Master-K ? Parlez-nous du processus…

Oui, K-Master-K est un jeune homme très talentueux. Il est vraiment talentueux en matière de composition musicale, lorsqu’il s’agit d’apporter des vibrations et c’est quelqu’un de vraiment cool. Il n’aime pas se montrer, il aime rester derrière et il ne veut jamais être le leader. Et c’est un gars cool et il est très très inspiré comme je l’ai dit précédemment. Nous avons aussi des moments difficiles, nous nous disputons aussi parfois mais le fait que nous ayons la même vision rend les choses plus faciles. Il est comme un frère pour moi, si nous avons un problème, nous l’exprimerons, nous sommes francs.

Si on devait faire le point sur Afrobikossa, que diriez-vous ?

Afrobikossa est un genre qui va faire le tour du monde parce que quand on regarde en arrière, le makossa a fait le tour du monde avec Manu Dibango, Ndedi Eyango, ils ont en fait emmené le Makossa partout, à l’international. Et j’ai l’impression que nous, la jeune génération d’artistes, nous le ressentons. Nous, Ridimz, avons décidé de dire « Revenons aux sources ». Donc, si vous écoutez des chansons comme “Dancia” ou “Dipita”, beaucoup d’entre-elles sont enrichies de sons camerounais. Et nous essayons de nous assurer que nous nous connectons avec elle, nous ne nous écartons pas des racines. Nous essayons de créer notre propre style, nous ne voulons pas copier. Je pense que c’est ce qui nous fait avancer et croyez-moi, Afrobikossa a un avenir parce qu’il prend le dessus. Si vous écoutez “Caleçon” de Ko-C, vous voyez l’impact qu’il a créé, à Dipita, etc… Afrobikossa est l’avenir à mon niveau.

Concrètement, c’est quoi Afrobikossa ?

C’est un genre de musique qui mélange tous les sons culturels du Cameroun. Si vous écoutez l’Afrobikossa, vous obtiendrez en fait ces sons comme bikutsi, makossa, makune, mangambeuh. Il se compose de tous ces sons, il n’a pas de limites. Un mélange de tous les autres sons africains populaires aussi mais surtout camerounais. On l’appelle comme ça parce qu’on ne voulait pas perdre le makossa car c’était le son international, pareil pour le bikutsi, c’est ce qui a donné le bikossa. L’afro se rapproche des autres sons africains. Comme Dipita, il y a un peu de coupé-décalé.

Quels sont les futurs projets de Ridimz ?

Nous avons un album qui sort l’année prochaine, nous étions censés le sortir cette année mais nous avons dû le repousser à l’année prochaine. Et nous avons notre single qui est sur le point est sorti “Shabassiko”. L’album contiendra beaucoup de collaborations internationals. Mais nous comptons déjà sur vous pour partager la nouvelle chanson.

 Quels sont tes futurs projets ?

Nous n’avons pas d’EP pour le moment. Mais comme je l’ai dit, un album arrive. Pour la production de beats, nous travaillons avec Locko, Ko-C, ETC.

Êtes-vous prêts à signer de jeunes artistes ?

Bien sûr, mais pas maintenant. Nous sommes encore en train de tout structurer, de clarifier les choses, de légaliser tous les documents, et d’essayer de faire en sorte que celà soit financièrement stable car ce n’est pas facile de signer un artiste. Surtout un jeune artiste, vous devez être financièrement stable pour vous assurer que l’artiste obtient tout ce dont il a besoin, tout ce qu’il veut, maison, voiture, confort.

Un dernier mot ?

Stay Original ! Soyez qui vous êtes ! Représentez vos racines. Personne n’est votre Dieu, vous êtes votre Dieu, votre représentation de Dieu sur terre, continuez, continuez à travailler dur, continuez à prier et essayez de créer des stratégies, comme je l’ai dit, revenez aux racines, représentez vos origins. Merci Culture Ebène pour votre travail. C’est pour la Culture. Merci beaucoup.

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