Icône d’une jeunesse fascinée par le langage d’une mode débarrassée de tout complexe culturel, Virgil Abloh était ce jeune noir qui ne lâchait rien même quand tout allait mal. Passé de vie à trépas le 28 novembre 2021 à l’âge de 41 ans des suites d’un cancer. C’est donc plus d’un qui garde de beaux souvenir de cette « légende » de la mode. Pour parler de l’impact de Virgil Abloh sur la mode noir, qui mieux que Defustel Ndjoko, ce grand designer et icône au service de la mode italienne pour nous en dire plus.
Culture Ebène : Bonjour Defustel Njoko et merci d’avoir accepté de nous parler du regretté Virgil Abloh
Defustel : Bonjour ! C’est moi qui vous remercie.
Culture Ebène : Vous êtes un designer et une icône de classe désormais très connu dans le fashion system, as-tu connu et rencontré le regretté de mémoire Virgil Abloh ?
Defustel : Je ne peux pas dire que je l’ai connu. Mais nous nous sommes croisé. Il faut dire qu’il avait installé le siège de Off-white, sa griffe pas loin des bureaux d’un de mes agents via Daniele Mannin, mais il dégageait beaucoup de force, de sérénité et d’humilité en même temps. Sa disparition est une perte incommensurable et qui sera vraiment difficile à combler car des Abloh, il en naît un tous les dix ans.
Culture Ebène : Croyez-vous que Virgil a eu un impact sur la mode en Afrique d’une part et chez les noirs en général ?
Defustel : Incontestablement et pas seulement. Abloh n’appartenait même plus à la communauté et nous étions fiers. Il n’a jamais cessé de soutenir les créateurs noirs et ceux de façon globale issue des minorités. Aux quatre coins du monde, Virgil était adulé, respecté car il a donné une nouvelle direction à la mode. Il a su et grâce à son génie, crée le pont entre la culture urbaine (Street style) et le luxe embourgeoisé. Il est ce génie qui a introduit la culture urbaine dans une vénérable et bourgeoise maison comme LVMH et ce dans tous les segments de celle-ci. Son aura donnait des ailes à nous autres dans cette industrie. Il imposait ses points de vues chez LVMH, il n’a pas hésité à introduire le Kinté Ghanéen dans une des plus belles collections Louis Vuitton. Il nous rendait vraiment fier. Franchement nous ne sommes pas encore remis de sa disparition.
Culture Ebène : En tant que premier grand créateur noir reconnu sur la scène mode internationale, croyez-vous que Virgil Abloh a changé la mode ?
Defustel : Attention, avant lui il y a eu Olivier Rousteing, nommé à 25 ans, D.A de Balmain et qui a fait passer ladite maison à un niveau jamais atteint en termes de rentabilité, de visibilité et de flamboyance. Il y a eu Dapper (Daniel Day), de Harlem, il y a Kerby Jean Raymond, le fondateur de Pyer Moss et actuel D.A de Reebook, il y a Telfar Clemens etc… Mais le fait est que, Virgil, jeune noir à la culture urbaine affirmée, skateur, Dj, à la tête d’une jeune griffe prisée de milenials ou de la génération Y dont il en est icone débarque de Chicago pour prendre la tête de la section homme de Louis Vuitton était juste un séisme.
Beaucoup de scepticisme, de condescendance et de doute ont accompagné sa prise de fonction. Mais, force est de constater que pour le monde entier, acteurs de l’industrie de la mode, consommateurs, journalistes, sportifs etc. Virgil a définitivement fait la face de la mode par sa vision global, son minimalisme et le caractère fonctionnel de ses créations. Et pour couronner le tout, il a fait exploser le chiffre d’affaire de LV et même de toutes les marques avec lesquelles il a collaboré. Son impact est incomparable et immense.
Culture Ebène : Pensez-vous que Virgil était le prototype du designer post-moderne ?
Defustel : Absolument ! D’ailleurs je me rappelle qu’il a répondu une fois à certains DP de grands magazines de mode qui avaient dû faire (ce qui n’était pas habituel) pour participer à un de ses shows, que son pouvoir venait de la rue. Oui il était moderne et avait 30 ans sur son temps. D’ailleurs vous allez constater que son remplacement sera très difficile car, il a non seulement mis la barre haute chez LV, mais son niveau et le foisonnement de sa créativité était juste stratosphérique !
Culture Ebène : Partagez-vous le point de vue de Virgil Abloh qui pensait que « la diversité dans la mode n’a rien d’une technique marketing » ?
Defustel : Mais bien sûr que je suis d’accord. Et c’est la même chose que Lewis Hamilton dit dans l’univers de la F1. La diversité n’est pas une technique marketing, mais juste le bon sens et le reflet de la société. D’ailleurs, vous avez vu l’impact énorme de Ye dans l’univers de la sneaker avec Yezzy. Il a juste révolutionné et introduit même des nouvelles lignes et matériaux et cette branche indépendante de Adidas vaut aujourd’hui près de 5 milliards de dollars. D’ailleurs, les créateurs noirs ne demandent même pas de faveur, juste qu’on leur donne leur place.
Culture Ebène : Autre chose à propos de Virgil Abloh, cette « étoile filante », qui a fait rayonner sa vision bien au‐delà de la mode, s’imposant plus qu’un créateur comme un véritable visionnaire ???
Defustel : Virgil, architecte de formation disait ceci : « je veux que Off-white soit une marque basée sur les graphique. »
Mon commentaire : Même dans 100 ans, ses graphiques seront aussi d’actualité que les créations de Marel Ducamp.
Virgil : « l’art se fait avec du recul »
Mon commentaire : son humilité lui donnait le recul nécessaire pour mieux appréhender le monde et échapper au tourbillon de celui-ci.
Virgil : « il n’y a aucune distinction entre un designer et un consommateur »
Mon commentaire : sa force résidait entre autre sa compréhension très avancée de ce que le consommateur voulait. Il sentait les tendances, les créaient et les imposaient.
Culture Ebène : Merci Defustel d’avoir répondu à nos questions
Defustel : Ce fut un plaisir.
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