Les salles ne font pas le plein pendant les spectacles.
La salle des spectacles de l’Alliance française de Garoua n’a pas fait le plein le 14 mai dernier lors de la représentation par les comédiens de la troupe «Le Mirador», de leur dernière création intitulée «Les enfants de Soweto nouvelle». Moins de 150 spectateurs ont en effet fait le déplacement pour un espace capable de contenir 400 personnes. Un fait pour le moins désormais coutumier. «Cette situation prouve que le théâtre a perdu ses lettres de noblesse. Ceux qui éprouvaient du plaisir à venir suivre les pièces de théâtre, ont déserté les salles partout dans le Grand-Nord», regrette un praticien de théâtre à Garoua. «Nous vivons dans un environnement qui en fait ne connaît pas le théâtre, qui n’a pas une éducation dans ce domaine et le ministère des Arts et de la Culture, à travers les délégations régionales, ne soutient pas le théâtre», croit savoir Elmody, comédien basé à Ngaoundéré. La vérité, c’est que le théâtre dans le Septentrion, comme au Cameroun d’ailleurs, est malade sur le plan professionnel, mais aussi sur le plan infrastructurel. Autrefois épicentre des arts du spectacle dans le Septentrion, l’Alliance Française de Garoua n’est plus que l’ombre d’elle-même. Lieu de création et de diffusion par excellence du théâtre dans cette partie du pays, l’institution peine à proposer des programmations permanentes du théâtre camerounais. A cela, s’ajoute les difficultés budgétaires du réseau culturel français au Cameroun, qui ont contraint le service culturel de l’ambassade de France à suspendre les fameuses tournées du réseau des Alliances et CCF grâce auxquelles le public pouvait découvrir des créations originales des metteurs en scène camerounais. Autre coup dur pour le Septentrion, le festival des canaris, l’unique dédié au théâtre dans cette partie du pays, a été mis en veilleuse par les organisateurs après deux éditions, car difficile de fonctionner sans mécènes et sponsors. Face à tous ces problèmes, comment continuer dans le métier d’acteur de théâtre au Grand-Nord ? Et le public, où le trouver et comment améliorer la qualité des productions locales afin de les rendre plus attractives et compétitives ? «En tant que professionnel de la chose, nous devons reconsidérer le théâtre traditionnel, classique, contemporain, en nous intéressant à des scènes chaudes qui traduisent nos réalités», suggère Elmody Mamoudou. Une piste «qui pourra contribuer à redorer le blason du théâtre dans le Septentrion», pense-t-il. Par ailleurs, la formation des jeunes comédiens doit être effective, afin d’avoir de bons praticiens, car «il est difficile de tromper le public», prévient Ousmane Sali. Face aux difficultés de diffusion, l’Etat ou même les municipalités doivent s’investir dans la construction des salles de spectacles, le ministère des Arts et de la Culture doit, pour sa part, soutenir les compagnies théâtrales dans leur travail de création. «Si nous avons une reconnaissance du travail que nous faisons et un soutien de la part du ministère des Arts et de la Culture, alors, nous amènerons le théâtre dans la rue ; bref, partout où se trouve le public», conclut Elmody Mamoudou.
Par Ebah Essongue Shabba
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