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Portrait : Corneille

« Love & Soul », le nouvel album de Corneille, n’est pas un recueil de reprises comme un autre, c’est une preuve d’amour. Ces love songs satinées et, pour la plupart, dédiées au dancefloor, incontournables tubes soul r’n’b’ des années 80 et 90, le crooner canadien les interprète dans leur langue originale, les illumine de sa voix chaude et veloutée, et les dédie aux femmes, à toutes les femmes. A la sienne d’abord, Sofia, qui l’a soutenu à chaque étape de sa vie mais surtout à Mila, sa fille qui lui a donné l’envie de faire cette album, A sa mère aussi, bien sûr. « Cette petite femme, mais géante dans mon souvenir, m’a montré par son seul exemple que les femmes étaient sans équivoque les égales des hommes », dit-il, ému à cette évocation. Fait rare pour un chanteur, il reprend certains titres écrits par des femmes pour des femmes, comme « Baby can I hold you » de Tracy Chapman ou encore « Smooth Operator » de Sade. « En Afrique, on n’avait pas cette réserve ni ces a priori, explique-t-il. Un homme pouvait chanter l’œuvre d’une artiste féminine sans que cela ne suscite de remarques. »

 

« L’album Love & Soul m’a décomplexé, avoue-t-il. Il m’a fait comprendre que, même si je suis auteur-compositeur, je peux procurer de la joie au public en faisant des reprises. Ce sont des hits qui appartiennent à tout le monde et qui créent du lien. J’ai choisi de reprendre des titres évoquant une époque qui me manque et qui ressemblent beaucoup à l’artiste que je suis. »

 

Aucun track de « Love & Soul », réalisé et remis au goût du jour par quatre producteurs parmi les plus talentueux du moment, Ofenbach, Joe Rafaa (M. Pokora,…), Fred Savio (Christophe Maé, Soprano,…), Thierry de Cara (Fréro Delavega,…), n’est donc là par hasard. Ce répertoire  évoque forcément un souvenir intime du passé de l’auteur de « Parce qu’on vient de loin ». « Time after time » de Cindy Lauper, magnifique chanson d’amour rythmée par le « tic-tac » du temps, fait remonter à sa mémoire un épisode mélancolique de son enfance rwandaise. « J’étais en primaire et je devais changer d’école, dit-il. Je me sentais dépaysé, déstabilisé de ne plus voir mes potes… »

Ce monument de suavité pop qu’est « Careless Whisper », le slow de George Michael et son intro magique au saxophone, évoque pour lui les premières boums, les primes amours adolescentes. Comme un goût de paradis perdu que l’auditeur, en découvrant la version de Corneille, aura, à son tour, sur le bout de la langue… « Au-delà du rationnel, de l’intellectuel, la musique a, comme un parfum, le pouvoir incroyable de faire affluer les souvenirs, rappelle-t-il. En évoluant dans ce métier, on a tendance à s’embourgeoiser et à oublier tout ça. J’avais envie de retrouver cette simplicité propre aux tubes. »

Comme une bande-originale de sa propre vie, la track-list de « Love & Soul » est superposable à celle de sa jeunesse à Montréal, lorsque, parti d’Allemagne, le jeune homme, âgé de vingt ans, tente sa chance au sein d’un trio vocal baptisé O.N.E. A l’époque – la fin des années 90, le début des années 2000 -, Corneille a un autre rapport à la musique, « plus pur » dit-il. Il passe ses nuits (blanches) à regarder des clips sur MTV, et ses journées à découvrir les nouveautés chez le disquaire du coin. Assoiffé de légèreté et d’insouciance – l’illusoire tentation d’exorciser les terribles heures qu’il a vécues au Rwanda – il veut croire coûte que coûte en un « Lalaland » absolu, un eldorado où tout ne serait qu’amour, soul et r’n’b’. Avec ses deux acolytes, aussi naïfs, candides et bosseurs que lui, il reprend, a capella, « True » de Spandau Ballet, « Fantasy » d’Earth, Wind & Fire, « Georgy Porgy » de Toto, « Stars » de Simply Red, « Wicked Games » de Chris Isaak, ou encore « Ain’t over » de Lenny Kravitz qui figurent tous sur l’album. Le trio, animé d’une foi à déplacer les montagnes, se distingue des autres musiciens par leur sobriété à toute épreuve – « on ne buvait pas, on ne se droguait pas, on n’était pas rock’n’roll » – et par une tenace timidité envers la gent féminine.

Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, Corneille a acquis une renommée internationale, enregistré six albums, rédigé son autobiographie, il s’est marié et il a eu deux enfants. Mais au fond de lui, il est resté ce fou de musique qui croyait qu’une mélodie pouvait changer le monde et adoucir l’âme. Un soul lover, forever.

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