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Saint Père Abiassi : « Dans le cinéma camerounais, je suis le plus grand »

Sauf qu’aujourd’hui, il n’en reste que des cendres, au détriment de celui du Nigéria voisin, alors célébré à cette 18ème édition des Ecrans Noirs. L’homme est choqué, mais accuse l’Etat qui selon lui, est en partie responsable…

Nous sommes à quelques jours de la 18ème édition des Ecrans Noirs. En tant que grand acteur du 7ème art au Cameroun, encore que vous comptez parmi les anciens, quel sentiment vous habite ?

Aaah ! Je dirais, un profond souvenir de balbutiements. Le Cinéma camerounais était pourtant arrivé à une maturité qui peu à peu, ou au fil des années,  s’est retrouvée perturbée par un manque criard de financement. Comme l’a dit M. Bassek Ba Kobhio, il est grand temps que l’Etat s’implique dans les activités culturelles du pays. Le cinéma est l’un des parents pauvres de la culture au Cameroun et c’est très malheureux, surtout quand on voit qu’ailleurs c’est toute une grosse industrie, à l’instar des Etats-Unis, du Nigéria, de l’Inde etc. C’est des pays où le cinéma est puissant et les acteurs sont payés parfois à auteur de centaines de millions. Demandez-moi à combien sont payés les nôtres, et je vous direz que je préfère garder ça pour moi.

Mais on a cru entendre que le festival cette année bénéficierait d’un financement de la part du MINAC…

Vous l’avez dit vous-même ; les Ecrans Noirs ont 18 ans cette année. Alors j’estime qu’on ne devrait plus parler de « tentative » de financement, mais plutôt que les Ecrans Noirs « s’autofinancent », car après tant d’années, ils auraient eu le temps d’amasser assez pour. Bah, moi je suis content de savoir que cette année l’Etat ait pris sur lui de s’impliquer en subventionnant l’édition.

Hier on parlait du manque de formation ou de sa non professionnalisation, or de plus en plus on constate l’évolution du Nigéria dans ce secteur, lui qui comptait pourtant des acteurs non professionnels. Finalement le vrai problème serait lié aux financements, à vous entendre parler…

Je l’ai toujours dit, la formation est un faux débat car moi qui suis devant-vous j’ai été formé sur le tas et j’ai un don que j’ai très vite su exploiter. Aujourd’hui je suis tout le temps consulté par des grosses maisons de productions qui viennent tourner ici et même hors du pays.

Vous n’aller pas dire que c’est facile…

Non ; attention. J’ai eu certes le talent, mais je me cultivais beaucoup. Je lis énormément, je regarde beaucoup ce qui vient d’ailleurs et de temps en temps je voyage pour aller voir comment ça se passe ailleurs. Donc c’est cet esprit de curiosité qui a également contribué à mon perfectionnement. Aujourd’hui nous avons des écoles qui forment des acteurs, il y en a qui sortent du lot, mais dans la grande majorité, comparer à moi, il n’y a pas photo. C’est vrai, le porc ne se dit pas gras, mais pour le moment, dans le cinéma camerounais, je suis le plus grand.

Vous énonciez les difficultés auxquelles fait face le cinéma camerounais ; mais nous constatons que les cinéastes continuent à produire. Est-ce à dire qu’il y a de l’espoir ?

Vous savez, au Cameroun on n’a encore rien fait en matière de cinéma hein… Nous ne faisons que commencer. Et déjà, le Cameroun méconnait des légendes du cinéma africain qui pourtant sont des fils d’ici. Vous avez un grand homme comme Jean Pierre DIKONGUE PIPA qui a gagné le tout premier Prix du FESPACO. Je vous assure, faites un tour au Burkina Faso, vous trouverez son monument érigé au cœur de sa capitale à Ouagadougou. Ici par contre aucune photo de lui nulle part. C’est vraiment malheureux. Il est temps que nous devenions sérieux. Arrêtez de croire qu’il suffit d’avoir une caméra, quelques amis et tourner un film pensant faire du cinéma. C’est pas le hasard.

Que fait Saint Père Abiassi aujourd’hui ? Il est resté dans le cinéma ?

De temps en temps je suis consultant, conseiller et tout… Mais pour rien au monde je ne quitterai le cinéma, car c’est toute ma vie. Je ne sais rien faire d’autre. Vous n’aller pas me demander d’aller vendre de l’eau glacée ? Moi je pense juste qu’il faille un jour penser sérieusement à appuyer ce secteur qui ma foi, est très porteur pour notre économie. Sans fausse modestie, nous avons les meilleurs techniciens, les meilleurs scénaristes aussi. Dans tous les domaines nous excellons, mais que faire de ces génies sans moyens d’accompagnements ?

 

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