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Céline 2 Petit Pays : « Je suis fière de ce que je suis devenue dans les SANS VISAS »

Elle vient tout juste de nous présenter son tout premier bébé musical solo, Mon Mari ; Céline 2 Petit Pays vient alors de loin… La petite fille du Chef Batié, Sa Majesté TCHOUANKEM Théodore, danse aux côtés de Petit Pays depuis 15 ans déjà, et depuis 2011 c’est elle la chorégraphe (bien avant elle il y a eu Samantha). Un parcours loin certes riche en expériences, mais au combien difficile et compliqué. Cette dernière a dû renoncer à ses études, et même aux recommandations parentales, tellement elle avait envie de réussir. Aujourd’hui, Céline peut se targuer de contribuer des sommes comprises entre 200 et 300 mille francs cfa aux réunions familiales, et même pour des deuils. Voici le destin d’une jeune camerounaise audacieuse et déterminée à réussir.

En quelle année est-ce que vous rejoignez les SANS VISAS et quels étaient les membres qui s’y trouvaient déjà à l’époque ?

J’intègre Les SANS VISAS en 2001 mais la rencontre avec le groupe s’est faite en 2000, à l’époque j’étais au collège INTAC à Douala (Bepanda) et je faisais partie de la Coopérative (association représentative des élèves de l’établissement) ;  j’y avais trouvé des grand-frères comme Pakito, Samantha, Jeannot Hens, Sylvain Ngondi, bref il y avait du beau monde.

Et qui vous a permis d’y entrer ? Du moins, qui vous a tenu par la main ?

Mon grand ami, qui malheureusement n’est plus de ce monde : le feu « Longo La Griffe ».

L’intégration s’est faite facilement ?

Non, pas du tout ; c’était même très difficile. Déjà il y a les leaders qui sont là et ils vous soumettent aux tests qui en principe se déroulent lors des répétitions, du lundi à samedi. Mon premier jour j’ai eu une grosse surprise ; en fait quand je sonne, c’est Petit Pays en personne qui m’ouvre le portail. Le temps de reprendre mes esprits, il m’a demandé ce que je suis venue faire par-là, et je lui ai répondu : Je veux danser pour vous. Il m’a ensuite demandé mon âge, – en fait je sortais des classes et j’avais pris le soin de cacher ma tenue-, et je lui ai répondu : 15 ans. Alors il a conclu en disant : « C’est la capitaine qui fait entrer les danseuses, donc attends là ». Et la capitaine à l’époque était Samantha. J’ai dû attendre plus d’une heure avant qu’elle ne se pointe, et elle m’a fait entrer… C’est comme ça que je trouve en pleine répétition : Xavier Lagaff, Eric La Forme, Titi Mozeli, Kwame Naïmro, ils étaient nombreux. C’est d’ailleurs ce jour que Mathematik arrivait nouvellement tout comme moi… A un moment, Petit Pays est venu assister au test –il le fait toujours-, et je n’arrivais pas à me contrôler, je tremblais, j’ai même fais quelques faux pas, et il a dit NON, je n’ai pas ma place dans son équipe, déjà parce que je suis trop jeune et en plus je n’arrive pas à danser correctement. C’est Samantha qui lui dit : « Non, boss, donne lui sa chance, elle peut c’est juste qu’il lui faut un peu d’entrainement ». Voilà un peu comment s’est faite mon intégration.

Et à la maison comment est-ce que cela était perçu ?

Déjà je le faisais à l’insu de mes parents, et aussi je ne voulais plus continuer avec l’école, je voulais danser et chanter. Alors je m’arrangeais toujours à avoir des vêtements de rechange dans mon sac et je m’arrêtais chez des copines pour m’échanger avant de me rendre aux entrainements, jusqu’au jour où mes parents se rendent compte que je ne leur présentais plus mon bulletin de notes. Alors j’ai été soumis à un interrogatoire et j’ai tout avoué. J’ai dit que je dansais chez Petit Pays, et ça a plongé mon père dans une colère noire. Mes parents m’avaient mis en garde et m’ont vraiment menacé, mais je n’en faisais qu’à ma tête, alors un bon matin mon père a débarqué chez Petit Pays avec des Antigangs et somment de me laisser partir. Heureusement j’avais remarqué son véhicule, alors j’ai pu me cacher à temps, mais ma mère avait pris le soin de me prévenir qu’ils débarqueraient… Une fois entrés, Petit Pays leur a avoué qu’au départ lui non plus ne voulait de moi mais qu’il avait été contraint, mais qu’à l’allure où vont les choses, le mieux serait que j’arrête de venir chez lui. Pour se rassurer, mon père m’a conduit au commissariat où j’ai dû signer des papiers par rapport aux engagements à moi imposés par mon père, après avoir été copieusement battue.

Mais vous y êtes repartie…

En fait, comme il m’a été exigé de signer des engagements, je l’ai fait, mais de l’autre côté, j’ai également été ferme sur le fait que je n’irai plus à l’école, peu importe l’argent qu’ils mettront pour ma scolarité. C’est ainsi que pendant toute une année scolaire, je ne suis pas sortie de la maison, pourtant ils avaient payé toute la pension. Voilà comment d’un commun accord nous sommes repartis au Commissariat pour qu’ils  signent mon accord parental relatif à mon retour chez Les SANS VISAS. Jusque-là, Petit Pays n’était pas rassuré, il ne voulait plus me voir chez lui, mais m’étant faite des relations avec quelques danseuses avant mon départ, j’ai donc pu joindre Vanessa –qui vit aujourd’hui en France-, et quand elle m‘a ouvert le portail je lui ai présenté l’accord parental. C’est en criant de joie qu’elle est allée le montrer aux autres ; voilà comment je réintègre les SANS VISAS et cette fois-là était la bonne car Turbo lui-même me dit : « Ok, c’est bien ; à compter d’aujourd’hui tu fais officiellement partie de la famille, on va bosser ».

Et à partir de quelle année commencez-vous à accompagner le groupe sur des grosses scènes ?

Déjà ma période d’apprentissage m’a pris un peu plus d’un an. Et entre temps je faisais déjà les premières parties de petites scènes… Mon premier vrai concert fut en 2003, et je me rappelle que j’avais perçu comme paye : 800 f cfa.

800 f cfa ? Et ça représentait quoi à l’époque ?

En fait ce n’était pas Petit Pays qui nous payait, c’est la capitaine qui nous remettait cette somme, comme pour nous faire comprendre qu’on a du chemin à faire, quoi.

Aujourd’hui, en 2015, vous vous lancez dans la musique ; mais déjà,  à quel moment sentez-vous que vous êtes faites pour chanter ?

Honnêtement, j’ai toujours chanté, j’ai toujours fait les deux : la danse et le chant. C’est juste qu’à un moment la danse a pris l’avance sur le chant, alors je dansais tellement que j’ai fini par arrêter de penser que je pouvais chanter. Mais comme on a coutume de dire : Le naturel revient au galop. Alors entre 2011 et 2012, je me suis mise à y repenser sérieusement, et avec le groupe j’essayais de temps en temps, je m’exerçais. Quand on avait un peu d’espace entre spectacles ou entrainements, je trouvais des astuces pour me rendre dans des cabarets et donner ce que j’avais dans le ventre. Les débuts n’ont pas été tendres car les critiques fusaient de partout, mais je savais ce que j’y venais chercher, alors j’ai gardé la foi. Parfois quand on était en route pour des spectacles –je repense à la fois où on se rendait en Guinée-, de temps en temps on s’essayait mais Petit Pays nous grondait et nous demandait de nous taire (rires) : « Vous chantez quoi comme ça ? Vous êtes devenues des chanteuses maintenant ? ». Mais c’est en 2014 que j’entre véritablement en studio pour commencer l’enregistrement de mon album. En effet, depuis notre passage en 2012 à YA-FE, nous avions fait la rencontre de M. Benjamin Lekoua et nous sommes restés en contact. C’est comme ça qu’un jour je lui soumets mes doléances en lui disant que j’apprends partout qu’il produit, et que je souhaiterais vraiment qu’il s’intéresse aussi à ce que je suis en train de faire et me produise. Il a été un peu réticent et m’a demandé si c’est vraiment ce que je voulais faire. Evidemment j’ai dit OUI. C’est ainsi qu’il appella Impérator pour mes premières séances en studio à L&F Records et on s’y est mis, sauf qu’en soirée quand il est venu écouter, il a trouvé le résultat merdique et a demandé à ce qu’on arrête tout immédiatement, et que je rentre sur le champ à Douala car je n’ai aucun niveau. C’est Impérator qui lui dit : « Non le King, c’est pas grave, la petite a du talent, laisse-nous faire un truc et on te le propose demain ». Au regard de tous les sacrifices consentis pour arriver à Yaoundé, je me suis dite : Non, il faut que je donne tout ce que j’ai dans les tripes ». C’est comme ça qu’Impérator m’encourage en me disant : « Ecoutes, on va faire autre chose qui puisse permettre à ce que ta voix soit mise en valeur ; tu as beaucoup de potentiel, sors juste ta voix, donne-toi ma petite ». Je vous assure, tout était super, on a fait un titre bikutsi et quand M. Benjamin Lekoua a écouté, il a demandé qui chantait comme ça et à Impérator de lui dire : « Mais c’est ta fille ; je te l’avais dit, elle a quelque chose cette petite ».

Et Petit Pays dans tout ça…

Bref, un jour, alors qu’il venait pour un spectacle au KATIOS Club –qui finalement n’a plus eu lieu-, il me contacte et je lui dis que je suis à Yaoundé et que j’ai rencontré M. Lekoua ; surpris il me demande pourquoi, alors je lui dis tout… Il était un peu choqué et a demandé à m’écouter. Surpris du registre que j’ai choisi (bikutsi), il m’a demandé pourquoi, et à moi de lui répondre : Parce que le Makossa est mort. « Qui vous a dit que le makossa était mort ? », m’a-t-il demandé… Quand on a rencontré ensemble M. Lekoua, Petit Pays lui dit alors qu’il me ramène à Douala car il a tout le nécessaire pour enregistrer, quitte à ce que je reprenne ses titres, mais en makossa, et en deux semaines on a pu bosser avec son arrangeur J-P FIONG. Le premier jour, quand il écouté ma voix, il est venu précipitamment et m’a dit : « Je ne veux pas que tu forces ; je n’attends pas que tu sois une Céline Dion ou Withney Houston. Ce que tu as déjà là nous suffit », voilà comment il convoque tous les musiciens et on a enregistré le premier titre le même jour. On a également fait le remix de Salamalekoum. Revenu à Yaoundé, M. Benjamin Lekoua trouve qu’il serait risqué de faire un premier projet avec les remix de mon mentor. Alors il a décidé qu’on le garde à l’écart pour plus tard et que l’on bosse sur mon potentiel. Voilà comment est né Mon Mari, mon maxi single de trois titres que je présente officiellement aujourd’hui.

Sinon, qui sont ou qui ont été vos modèles ?

Mes modèles sont Yondo Sister, Tchala Muana, K-Tino (pour le show), Barbara Kanam (côté diva), et Anne Marie Nzié que j’écoute beaucoup plus pour le côté chant, mais aussi  Majoie Ayi et Lady Ponce que j’ai beaucoup interprété en cabarets.

 

Et aujourd’hui, la famille qui au départ était réticente, comment prend-elle les choses ?

Tout le monde me soutient ; aujourd’hui la petite Céline peut elle aussi contribuer de petites sommes comme 200 000 frs ou 300 000 frs pour des réunions ou des deuils. Bref, ça va plutôt bien. Hier encore on me coupait des vivres parce que je voulais poursuivre mes rêves, même aux garnitures je n’avais plus droit, il fallait attendre les 800 frs de la capitaine après les spectacles pour m’en acheter… Aujourd’hui je suis fière de moi et de ce que je suis devenue.

 

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