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« Les Guidar délaissent de plus en plus leur culture », Alfa Barry, chanteur du groupe Guma na kada

Alfa Barry on te connaît dans un registre musical qui purement sahélien, aux antipodes de cette autre facette de toi qu’on découvre à travers l’ensemble Guma Na Kada. Pourquoi un tel projet ?

Comme les voies du Seigneur, les profondeurs de la musique sont insondables. Au moment où on pense avoir réussi à cerner à peu près le sujet, il survient toujours de nouvelles productions, de nouvelles collaborations, pour nous émerveiller encore. Le groupe Guma na kada scelle la rencontre entre deux fils du Mayo Louti qui appartiennent au peuple Guidar et ils ont voulu dire au monde leur fierté d’être fils de ce peuple millénaire qu’on retrouve aussi bien au Cameroun qu’au Tchad dans la région du Mayo-Kebbi Ouest plus précisément. Et d’autres parts, j’ai constaté comme certains de mes aînés que les jeunes Guidar ont de la peine à parler la langue Guidar, ils abandonnent leur us et coutumes au profit d’autres cultures. Il faut certes s’ouvrir mais ne jamais oublier d’où l’on vient car ce n’est qu’à ce prix qu’on saura où on va. Donc le groupe vient apporter son soutien à l’association Guma Asprocg en sensibilisant le peuple Guidar par la musique sur la nécessité de préserver et pérenniser notre tradition.

Quel message ton compère et toi souhaitez-vous diffuser à travers cet album ?

A l’écoute du son du Guma, c’est tous les Guidar sont appelés à se lever pour venir danser et écouter les différents messages que nous véhiculons dans nos différentes chansons. Dans la chanson intitulée Guma, nous appelons justement tous les Guidar à se lever comme un seul homme à l’écoute et venir célébrer leur culture. Dans la chanson An ba anamda qui veut dire Ici chez nous,  nous encourageons le vivre ensemble entre les Guidar mais aussi accepter les non Guidar qui sont tout de même nos frères parce que Camerounais comme nous. Dans la chanson Wonna kissa nous déplorons le fait que nous ne respectons plus nos coutumes et nous invitons les jeunes respecter les valeurs traditionnelles. Nous chantons également pour la paix et soutenons nos forces de défense dans la chanson intitulée Non à la guerre. La chanson Toumba nawa est un chant de joie et de fête tandis que dans le titre Guezew guezew nous chantons la beauté légendaire de la femme Guidar qui est irrésistible.

Dans ce monde devenu village planétaire quel est l’avenir de la culture Guidar d’après toi ?

La culture Guidar est en danger. Les Guidar délaissent de plus en plus leur culture.  Ils prétendent s’ouvrir. Mais s’ouvrir ne signifie pas se perdre, parce que  s’ouvrir  suppose se connaître soi-même, donc savoir ce qu’on fait et ce qu’on recherche en s’ouvrant. Aucune civilisation ne se débarrasse ni de son passé, ni de son histoire, puisqu’aussi bien c’est le respect de ce passé et cette histoire, qui la propulse en avant. Ceux qui apprécient plus la culture européenne que la culture Guidar, reléguée au stade de folklore (quand elle se manifeste encore à leurs yeux), doivent comprendre que c’est parce que les autres magnifient leurs cultures, qu’ils en tombent amoureux. Sinon, il n’existe pas de culture meilleure qu’une autre, à moins que l’on pense que le sucre est meilleur que le sel. Certains ont même réussi à transformer la culture Guidar en une manifestation ludique et virtuelle. C’est honteux. J’appelle donc tous les Ɗiy na Kaɗa à se réveiller, taire nos différences, bâtir et renforcer la cohésion sociale entre nous et se lever comme un seul homme pour pérenniser notre culture.

Interview réalisée par Ebah Essongue Shabba

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